Comment prier ?
Homélie de fr. Jean-Christophe  |
le 24 juillet 2022  |
Texte de l'évangile : Lc 11, 1-13

«Seigneur, apprends-nous à prier.» Comme les disciples, nous sommes impatients d’entendre la réponse de Jésus. «Quand vous priez, dites : ‘Père’, Abba» La prière à l’école de Jésus est une relation d’intimité avec notre Père du ciel. Il y a une grande nouveauté dans cette prière que propose Jésus car jamais un juif ne s’adressait à Dieu avec ce terme de «Abba», qui signifie «papa» en araméen. La prière, à l’école de Jésus, est une expérience de reconnaissance de Dieu comme Père. «Nul ne connaît le Fils si ce n’est le Père, dit Jésus, et nul ne connaît le Père si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut bien le révéler» (Mt 11,27). Dans la prière, Jésus se plait à nous révéler son Père et notre Père. À l’heure de sa Passion, Jésus priera ainsi : «Père juste, le monde ne t’a pas connu, mais moi je t’ai connu.» (Jn 17,25)

Jésus désire que nous entrions dans cette même connaissance. Dieu n’est pas père comme les pères humains qui ne l’ont pas toujours été. Pour eux, la paternité est un don surajouté à leur existence. Mais il en va tout autrement quand il s’agit du «Père de qui toute paternité, au ciel et sur la terre, tire son nom» (Ep 3,14). Lui n’est jamais devenu Père comme il n’est jamais devenu Dieu. «De toujours à toujours», il est Dieu, chante le psalmiste (Ps 90,2). De toujours à toujours, il est Père du Fils unique. De toujours à toujours, il pense et agit paternellement. La joie de Dieu, c’est d’être Père et de nous le révéler dans la prière. Prier Dieu comme Père, c’est lui permettre d’exercer sa paternité. Dieu aime qu’on le prie car c’est là qu’il est vraiment notre Père. Le propre du Père n’est-il pas de donner à son fils ce qui lui est nécessaire pour grandir ? «Votre Père sait bien ce qu’il vous faut, avant même que vous le lui demandiez», confie Jésus à ses disciples (Mt 6,8). C’est donc que notre Père, qui «nous a élus en lui dès avant la fondation du monde» (Ep 1,4), connaît le fond de nos cœurs et la soif qui nous habite. La prière ne se vit pas dans la peur mais dans la confiance filiale.

«Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.» Quelles paroles rassurantes de la part de Jésus. Celles d’un Fils qui croit en la bonté de son Père. Jésus est tellement familier de cet amour prévenant du Père qu’il ne peut en douter un seul instant. Et Jésus insiste : «Quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira.».

Cependant, peut-être nous interrogeons-nous sur notre propre prière en entendant ces recommandations de Jésus ? Que de fois avons-nous demandé sans rien obtenir, avons-nous cherché sans vraiment trouver, avons-nous frappé à la porte, sans la voir s’ouvrir devant nous ! La prière de demande semble avoir des limites. Peut-être prions-nous mal ? Peut-être manquons-nous de confiance et de vraie familiarité avec Dieu ? Peut-être nous exauce-t-il autrement que nous le demandons ? Chacun peut trouver des raisons à ce manque de réponse. Mais Jésus insiste : demandez, cherchez, frappez et vous serez exaucés. Le problème ne semble donc pas tant provenir de notre demande que de notre accueil de la réponse de Dieu. Dieu connaît nos demandes. Il sait même mieux que nous ce qu’il nous faut. Son projet d’amour pour nous prend en compte tous nos cris, nos attentes, nos désirs. Il nous répond en nous amenant peu à peu à nous ajuster à son dessein d’amour. Sur un plan humain, notre prière peut sembler stérile et inutile. Mais si elle ne change rien à une situation donnée, elle ne revient pas sans résultat car elle change le cœur de celui qui demande.

Demandez et vous recevrez un cœur capable d’accepter, de consentir, un cœur capable d’aimer là où nous n’arrivons plus à aimer. Cherchez et vous trouverez la vraie voie du bonheur qui est de croire que Dieu n’est pas étranger à ce que nous vivons, à ce que nous supportons, mais qu’il est Celui qui porte tout. Frappez et votre cœur de pierre s’ouvrira pour laisser jaillir le flot de vie qu’est l’Esprit-Saint. Finalement, la prière nous change personnellement. Notre regard s’ouvre aux dimensions de Dieu.

Demander, chercher, frapper, nous pousse à convertir notre cœur. Si nous désirons la paix, que nous soyons donc artisan de paix. Si nous désirons l’amour, que notre cœur brûle de charité. Jésus répond à nos demandes en nous donnant la capacité de nous convertir par le don du Saint-Esprit. Il n’y a pas de plus grand don qui puisse nous être fait, que celui du Saint-Esprit. Car cet esprit qu’il nous donne, c’est la puissance de la Résurrection qui nous fait passer de la mort à la vie.

Finalement, notre demande est aussi à convertir car nous demandons de trop petites choses. C’est l’Esprit-Saint qu’il faut désirer. C’est la force de Dieu qu’il faut quémander. Par la prière, Dieu renouvelle son mystère d’incarnation où le divin rejoint ce qu’il y a de plus humain. Il trace un chemin de vie nouvelle en toute situation.

Si silence de Dieu il y a dans notre prière, c’est un silence re-créateur, un silence qui fait grandir l’homme en le transformant en homme spirituel, un silence du Samedi-Saint dont Marie a le secret. Oui, Dieu est proche de nous et il chemine avec nous. Qu’en Lui soit notre confiance.

Seigneur, donne-moi un cœur qui écoute ton silence, un cœur qui espère contre toute espérance, un cœur qui se laisse transformer, un cœur qui te loue et qui t’aime, un cœur temple de ton Esprit-Saint.

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