Ecouter avant d’agir : le secret de la paix intérieure
Homélie de fr. Jean-Christophe  |
le 20 juillet 2025  |
Texte de l'évangile : Lc 10, 38-42

Ce matin, l’Évangile nous raconte une scène profondément humaine. Jésus arrive dans un village. Il est reçu par Marthe, qui s’affaire pour bien l’accueillir. Sa sœur Marie, elle, s’assoit aux pieds du Seigneur et l’écoute. Et voilà que Marthe, agacée de faire tout le travail, vient se plaindre. La réponse de Jésus est étonnante : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part. »

Ce texte, nous le connaissons bien. Et pourtant, il peut nous déranger. Marthe fait tout pour bien recevoir Jésus : elle prépare le repas, elle sert, elle veut bien faire. Pourquoi Jésus semble-t-il lui donner tort ?

La difficulté de Marthe n’est pas son activité. Jésus n’est pas en train de dire que le service est inutile. Il ne lui reproche pas d’être active. Ce qu’il souligne, c’est l’agitation intérieure de Marthe, son rapport désordonné à l’action. Marthe est inquiète, préoccupée, agitée. Elle est tellement tournée vers ce qu’elle a à faire, qu’elle en oublie pour qui elle le fait. Elle est fatiguée, et pas seulement physiquement : son cœur est dispersé. Elle a perdu son unité de vie.

Peut-être que cette situation vous parle personnellement ? Qui, parmi nous, ne s’est jamais laissé envahir par les tâches à accomplir ? Qui n’a jamais été accaparé par ses responsabilités au point de perdre sa paix intérieure ? Pensons à cette mère de famille qui gère le travail, les enfants, les repas, la maison, sans jamais trouver une minute pour souffler. Pensons à cet homme qui court d’un dossier à un autre, d’un rendez-vous à un autre, en croyant que plus il fait, plus il est utile.

Mais au fond, que cherche Marthe ? Elle veut bien accueillir Jésus. Mais dans son agitation, elle passe à côté de sa présence. Elle prépare la table… mais elle oublie de s’asseoir à la table.

Marie, elle, ne parle pas. Elle ne revendique rien. Elle est là, simplement, en prière, aux pieds de Jésus, dans l’écoute. Elle choisit de se poser. D’écouter. D’être présente.

C’est là une leçon précieuse. La prière authentique n’a pas besoin de se justifier ; elle se vit plus qu’elle ne s’explique. Peut-être aimerions-nous, parfois, que Marie nous parle de sa manière de prier, qu’elle nous donne une méthode. Mais non. Marie vit sa prière plus qu’elle ne l’enseigne. Elle nous montre, par son attitude, que la première chose à faire, c’est d’être là. Être présent. Ouvrir son cœur. Écouter.

Et Jésus le dit clairement : « Marie a choisi la meilleure part ». Cela ne veut pas dire que le service n’est pas important. Mais cela nous rappelle que toute action doit naître d’une écoute. Que l’essentiel commence par l’accueil intérieur.

Prenons un exemple concret. Imaginons un bénévole dans une association. Il donne beaucoup : il distribue des repas, il s’investit, il aide. Mais s’il fait tout cela par devoir, sans nourrir sa relation au Christ, il finira par s’épuiser. Il ressemblera à Marthe : plein de bonne volonté, mais vidé intérieurement.

Au contraire, celui qui prend le temps, chaque jour, de se poser, de se recentrer sur le Seigneur, de puiser à la source par la prière, pourra agir, mais sans se perdre dans l’agitation. Son service sera habité.

Alors, frères et sœurs, qu’est-ce que cela change pour nous ? Peut-être une question simple à se poser en ce temps d’été où nous sommes plus disponibles : où en suis-je de mon écoute ? Où en suis-je de ma prière ? Est-ce que je commence mes journées en me connectant à mes tâches… ou à mon Seigneur ?

Parfois, prendre cinq minutes de silence le matin change tout. Se poser avant de s’agiter. Commencer par écouter. C’est choisir « la meilleure part ». Non pas pour fuir l’action, mais pour faire ce petit plus qui permettra à ce que j’ai à faire d’être fécond. Dans nos vies remplies, c’est un défi. Mais c’est un chemin de liberté.

Alors aujourd’hui, demandons au Seigneur la grâce de cette liberté intérieure : celle de Marie, qui a compris que la vraie fécondité commence aux pieds du Seigneur. Et que nos Marthe intérieures puissent se laisser apaiser, non pour s’arrêter d’agir, mais pour retrouver le sens profond de tout ce qu’elles font.