Vous, comme moi, nous venons d’entendre cette parole bouleversante du centurion Romain : « Vraiment cet homme était fils de Dieu » ! La violence la plus ignoble vient de se déchaîner sur Jésus, l’arrestation nocturne, les bâtons, les gourdins pour arrêter Jésus, les cordes pour arrêter le coupable, les coups au visage, les crachats, les mensonges, le reniement de Pierre, les moqueries des uns, le mépris des autres, le sarcasme d’Hérode, la lâcheté de Pilate, la flagellation, la torture gratuite, la couronne d’épines, les cris de haine sur le chemin du Calvaire, le poids de la Croix, le regard satisfait des grands-prêtres, les clous qui transpercent les pieds et les mains de Jésus, l’abandon généralisé de ses disciples, la raillerie du larron, le coup de lance, le corps immobilisé, défiguré qui pèse lourd sur la Croix, rien n’arrête la violence, l’horreur semble triompher… et pourtant, et pourtant un homme se tient là à côté de Jésus, cet homme qui a été témoin de l’innommable et qui lâche dans un saisissement inattendu : « Vraiment cet homme était fils de Dieu ».
C’est lui, un étranger, un Romain, un occupant, qui dit le mieux, dans les mots et aussi à partir de l’élan de son cœur, qui est Jésus. Face au crucifié mort, un crucifié parmi des centaines de milliers dans l’empire romain, quelqu’un enfin peut dire qui il est et le dire bien, quelqu’un qui n’est pas possédé par un esprit mauvais, quelqu’un qui pourrait ne voir qu’un excité troublant l’ordre public, reconnaît : « Cet homme était Fils de Dieu ! ». (Mgr Eric de Moulins-Beaufort)
La lecture de la Passion du Seigneur au début de la semaine sainte veut sûrement nous rappeler ce que le Christ a fait, ce qu’il a enduré, ce qu’il a accompli et se laisser toucher par le fait que sa Vie nul ne la prend, mais c’est lui qui la donne. « Il s’agit aussi pour nous d’ouvrir les yeux sur le mal dont nous sommes capables, ce déferlement de la violence qui advient quand l’ivresse du mal s’empare de nous ». (fr Antoine-Emmanuel) Ce qu’il se passe en Ukraine, en Ethiopie, mais aussi plus près de chez nous à travers autant de manifestations qui dérapent, qui dégénèrent, autant de crimes évoqués dans les journaux.
Cela étant, si Satan veut nous enchaîner dans la révolution des armes, Dieu veut la révolution de la tendresse. Cette révolution, Dieu ne l’accomplit pas à coup de gaz lacrymogène, de lance incendie et de mégaphone. Non, Dieu n’envoie pas son service d’ordre pour entamer sa révolution. Il vient lui-même. Dieu est venu désarmé. Tellement désarmé que les apôtres eux-mêmes en ont été épouvantés et ont fui quand ils ont vu qu’à Gethsémani, Jésus ne prenait pas les armes.
Jésus Lui-même ne pouvait-Il pas appeler douze légions d’anges pour en finir avec cet innommable mépris de Dieu ? Il le pouvait… ; Il ne l’a pas fait. Au lieu de réagir avec des armes, Jésus est venu désarmé, ou plutôt armé de la seule arme qui puisse triompher de la violence : l’amour. Comme le dira Sainte Catherine de Sienne : « Ce ne sont pas les clous qui retiennent le Christ sur la croix, mais l’amour. »
Et l’Amour est allé jusqu’au bout. « Pour désarmer nos mains, nos regards, nos pensées, Il est venu désarmer nos cœurs. Il est venu guérir notre angoisse la plus profonde, notre sentiment brûlant et inconscient de grave culpabilité devant Dieu qui est à l’origine de toute notre violence. Jésus est venu mettre fin au royaume de Satan sur les cœurs ». (fr Antoine-Emmanuel)
Cela le Centurion romain l’a saisi, cela le Centurion romain l’a reconnu devant le supplicié en Croix : « Vraiment cet homme était fils de Dieu ». Là sur la Croix, il a reconnu le Fils de Dieu. En cette Semaine Sainte, levons des yeux remplis de foi en direction de la Croix. Dans cet amour gratuit, inouï, le centurion, un païen, trouve Dieu. Qu’il en soit ainsi pour nous.
Demandons pour cela la grâce de l’étonnement. Saint François d’Assise, en regardant le Crucifié, était surpris que ses frères ne pleurent pas. Et nous, saurons-nous être émus par l’amour de Dieu ? Saurons-nous non seulement voir Dieu, mais laisser Dieu être notre Dieu ? notre Sauveur ? notre Rédempteur ? Jésus est mort, cela est sûr, mais est-il bien mort pour moi ? (cf Pape François)
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