Jésus dit à Thomas :« Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. » Ce que Jésus présente à Thomas, ce que Jésus offre à Thomas, chers frères et sœurs, ce ne sont peut-être pas des preuves, mais des signes. Les marques de sa Passion. Ce que l’Église propose tout au long de son existence, éclairé par la présence du Christ Ressuscité, ce ne sont pas des preuves, mais des signes. Et certains signes portent le nom des sacrements. Ces signes à travers lesquels Dieu agit, comme il a agi en Jésus quand celui-ci était encore sur la terre parmi nous. Dieu nous offre les signes liés à la vie de Jésus, les signes de sa tendresse, les signes de sa compassion, de sa fidélité. Les signes de sa charité, qui va à l’infini. Ainsi le baptême, la confirmation, la réconciliation, le mariage, le sacerdoce ministériel, le sacrement de malade et l’Eucharistie, autant de signes par lesquels Dieu nous montre les marques de son amour fou pour chacun de nous. À travers eux notre foi se fortifie, et nous nous joignons à Thomas qui confesse : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
Cependant , il n’est pas simple d’inviter quelqu’un à la foi : cesse d’être incrédule, sois croyant. Il ne suffit pas d’un discours. Il ne suffit pas de persuader. Il faut, comme l’a fait Dieu, de se lier avec l’autre par les gestes, par les signes de l’amitié et de l’amour. Dieu ne cesse de le faire pour nous chaque jour.
Nous pouvons dire que Thomas n’est pas un patron de ceux qui doutent, mais plutôt un patron de ceux qui poursuivent leur recherches dans la foi. Ceux qui exigent, en quelque sorte, une expérience personnelle d’avancement dans la foi. Avance, dit Jésus à Thomas. C’est l’existence de ceux qui ne sont pas satisfaits d’une foi théorique, d’une simple appartenance à une religion, même annoncée par les autorités considérées toujours comme incontestables. On ne se rebelle pas, mais on veut avancer dans la foi. Thomas exige en quelque sorte que le Christ apparaît pour lui en tant que celui qui est mort pour lui ! Pas seulement pour les péchés du monde, globalement, mais pour chacun personnellement. Il m’a aimé et s’est livré pour moi dira Saint-Paul après sa propre expérience du Christ ressuscité sur le chemin de Damas.
Mais attention. Jésus ajoute justement ici une béatitude pour ceux qui croient sans avoir vu. Certes, ici encore il ne s’agit pas de croire sans avoir jamais rien vu ou jamais rien entendu. La foi naît comme même de la prédication. Mais il s’agit de foi humble, d’une foi des pauvres. Nous le savons, les béatitudes de Jésus sont adressées aux pauvres !
« Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » Heureux les pauvres de cœur, heureux ceux qui pleurent, heureux les doux, heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, heureux les miséricordieux, heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. « Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
On dirait que la foi, notre foi, est vraiment rangée du côté des pauvres. Du côté de ceux qui pleurent, du côté de ceux à qui manque quelque chose. Oui, c’est un manque spécifique, un vide spécifique, chargé de la promesse. C’est la foi d’Abraham, celle liée à la promesse, à quelque chose que nous ne possédons pas encore, mais que nous entrevoyons à travers des signes. Abraham, sans avoir possédé la terre promise, a pu la transmettre à sa postérité. Heureux celui qui croit sans avoir vu. C’est dans la foi, sans avoir connu la réalisation des promesses, qu’ils sont tous morts ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs.
Chers frères et sœurs, nous n’avons pas besoin de preuve pour croire. La preuve que Dieu nous aime nous a été déjà donnée dans la vie de Jésus. Le Christ est mort pour nous et il est ressuscité pour nous. C’est la preuve que Dieu nous aime! Nous avons besoin de signes et Dieu nous les donne sans cesse, sous les différents aspects de la vie de l’Église.
Finalement, croire sans avoir vu, peut signifier paradoxalement de regarder tout dans la foi.
Car l’amour est inventif ! Dieu nous donnera toujours les signes de sa sollicitude. Par la charité exercée dans son peuple, par la fraternité qui se vit entre nous, ou tout simplement par la beauté de la nature accessible à tous. Voilà ce que Dieu offre à ses amis. Mais les signes les plus sûrs sont les signes des sacrements. Ces signes là se perpétuent à travers l’histoire dans l’église depuis 2000 ans. Ils nous sont parvenus du Jésus-Christ lui-même et ils sont les instruments par excellence de la grâce que Dieu nous offre. En eux Jésus ouvre pour nous aussi son côté transpercé. Alors nous pouvons dire aujourd’hui à Jésus les paroles de Thomas : Mon Seigneur est mon Dieu dans cette communion au Corps et au Sang du Christ, le signe de l’amour infini de Dieu.